LES GRAFFITI RÉSISTANTS SOUS VICHY

Graffiti résistant gravé sur un mur début 1944

Graffiti résistant gravé sur un mur début 1944 (auteur et lieu inconnus)

 

 

          Sous Vichy, de nombreux Français s'opposent  au gouvernement de Pétain, notamment dans le cadre de la résistance. Nous analyserons dans ce chapitre un certain type de résistance, le graffiti.

 

          Nous vous présenterons dans une première partie l'origine du graffiti ainsi que son utilité. Puis, nous vous présenterons dans une seconde partie la signification d'un graffiti photographié pendant l'occupation, et qui nous a particulièrement touchés.

 

 

I/ Les origines du graffiti

         

        Les graffiti sont des peintures ou plus précisément des inscriptions faites sur des murs ou des objets présents dans des espaces publics de manière à ce que le message voulant être passé soit visible et vu par le plus grand nombre de personnes possible.

 

      Les graffiti existent depuis bien des milliers d'années, depuis la préhistoire même. Au départ cela servait simplement à représenter des mains, des animaux puis il y a eu une évolution, une  modernisation. Nous pouvons considérer que le graffiti est un art : la représentation de ceux-ci qui était banale à leurs débuts est devenue aujourd'hui un moyen d'exprimer pleinement sa créativité, son opinion, et ce fut donc un moyen approprié pour résister au gouvernement de Pétain, sous Vichy, ou à l'occupant nazi, en Zone occupée. 

 

Graffiti résistant gravé sur un mur pendant la Seconde Guerre mondiale

Graffiti résistant gravé sur un mur pendant la Seconde Guerre mondiale (auteur et lieu inconnus)

 

 

         De nos jours, les graffiti sont très représentatifs, pour ceux qui les dessinent, de la société. Ils expriment à travers cet art leur opinion politique, parfois même leur état psychologique. Les graffiti servent aussi de décorations ou de divertissement visuel : par exemple, nous trouvons actuellement, sur les murs de nos rues, de nombreux graffiti représentant des super-héros, des personnalités célèbres, etc. Toutefois, en France occupée comme sous Vichy, gravés à la hâte dans des rues peu surveillées, souvent de nuit, ils étaient porteurs de Résistance

 

 

II/ Analyse personnelle d'un graffiti résistant

Graffiti Mort aux traîtres Résistance Paris 1940 1945

Graffiti Mort aux traîtres Résistance Paris 1940-1945

 

 

          Cette image est une photographie d'un mur de Paris représentant un graffiti allant à l'encontre du régime nazi. Il a été réalisé par un résistant, resté donc anonyme, car à ce moment là il risquait sa vie en faisant preuve de résistance, pendant la seconde guerre mondiale (1939-1945).

 

        Sur cette photographie nous pouvons constater que chaque représentation signifie quelque chose pour le résistant qui l'a réalisé.

 

          - Premièrement, nous pouvons lire en haut à gauche l'inscription « mort aux traîtres ». Ce résistant a écrit cela car la France a fait une alliance avec l'Allemagne alors que ces pays étaient ennemis en 1939. Cette inscription est donc à destination du régime de Vichy et plus particulièrement de Pétain, critiquant sa politique de collaboration et sa reddition lors de la demande d'armistice effectuée en juin 1940, vécue par les futurs résistants comme une trahison.

 

          - Deuxièmement, en bas à gauche se trouve une affichette, autrement dit un papillon, sur lequel est représentée une croix gammée, symbole de l'Allemagne nazie. Dans cette croix gammée est inscrit le nom de Pierre Laval, chef du gouvernement et principal artisan de la collaboration avec l'Allemagne. Ce graffiti n'est donc pas, comme il pourrait le paraître à première vue, un soutien en faveur de l'occupant mais plutôt une dénonciation du fait que le gouvernement de Laval, depuis Vichy, agit au service de l'Allemagne nazie. 

 

          - Troisièmement, en haut à droite se trouve une croix de Lorraine et un « V ». La croix de Lorraine est un symbole emblématique de cette province qui à l'origine a été employé par l'Amiral Muselier, Lorrain d'origine, comme signe de ralliement des forces navales et aériennes françaises. L'usage de ce symbole, devenu celui des FFL et de la résistance gaulliste, valait d'être pourchassé par la police politique de Vichy (la milice) et son auteur risquait de payer une amende, voire davantage. Le « V » est la première lettre du mot « victoire » qui fait référence à la victoire que les Résistants appellent de leurs vœux. Ces deux symboles apparaissent ici côte à côte, ce qui est très fréquent : cela permet d'insister sur la symbolique de Résistance, et de fragiliser temporairement, avant que les signes ne soient effacés, la propagande allemande.

 

           - Pour finir, en bas à droite se trouvent 2 dates, l'une au dessus de l'autre : 1918 et 1943. 1918 nous ramène à la victoire de la Triple Entente sur la Triple Alliance menée par l'Empire allemand. Et 1943 correspond à l'année de création de ce graffiti, qui voit les forces du IIIème Reich céder partout. Par ce parallèle, l'auteur du graffiti semble signifier que la victoire française est proche. 

 

          Ce graffiti est fort. L'observer, plus de 70 ans après, rend "réel", même si nous sommes jeunes, cette période sombre de l'Histoire. Il semble montrer une rage, une haine puissante. Son auteur a du faire preuve d'un grand courage, et a peut-être été surpris ou arrêté. Ce graffiti est une leçon de bravoure, dont nous devrions nous inspirer quand les libertés sont menacées. 

 

  

          Conclusion

 

         Les graffiti ont donc depuis longtemps une grande importance et notamment à cette période pour résister en toute discrétion sans signature, sans distinction personnelle, pour se protéger tout en faisant passer un message fort.

 

 

 

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          CI-DESSOUS, QUELQUES GRAFFITI RÉSISTANTS GRAVES SUR LES MURS DU FORT DE ROMAINVILLE ET REPRODUITS DANS L'OUVRAGE : 

 

            Graffiti de résistants. Sur les murs du fort de Romainville, 1940-1944. Editions Libel, Lyon, 2012, 160 p.

  

       Ces graffiti ne comportent pas de messages résistants. Ils ne comprennent que des noms. Mais ces noms appartenaient à des hommes et des femmes arrêtés, en attente d'être déportés ou exécutés. Ce qui rend ces graffiti émouvants.

 

         Ce sont des symboles forts de résistance. Car en gravant leurs noms sur les murs du fort de Romainville, ces résistants et résistantes ont affirmé leur existence alors qu'on voulait les faire disparaître. 

 

 

Graffiti Armand Dutreix juin 1943 Armée secrète (AS) Résistant

Graffiti laissé par Armand Dutreix en juin 1943, résistant de l’Armée secrète (AS) de la Haute-Vienne fusillé comme otage le 2 octobre 1943.

Crédits :  E. Jacquot / AD93.

 

 

Graffiti laissés par un groupe de femmes résistantes communistes au fort de Romainville

Graffiti laissés par un groupe de femmes résistantes communistes : elles sont déportées le 18 avril 1944 à Ravensbrück.

Crédits : Photo E. Jacquot / AD93.

 

 

Fernand Dalaine laisse ce graffiti en 1943 au Fort de Romainville

Fernand Dalaine laisse ce graffiti en 1943. Il décède à Nordhausen en avril 1945.

Crédits : E. Jacquot / AD93.

 

 

 

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DANS LA VIDÉO CI-DESSOUS, L'ANCIEN RÉSISTANT JEAN RISPAL ÉVOQUE LES GRAFFITIS

(Tournage : 2009 / Crédits : © AERI Droits réservés)

  

 

 

 

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 A LIRE SUR LE SUJET

 

Philippe Delangle, Signes de la collaboration et de la Résistance, catalogue de l'exposition présentée par l'Ecole Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg du 8 février au 15 mars 2000, itinérante en France et à l'étranger à partir d'octobre 2002, Paris, Autrement, 2002.  

 

Graffiti de résistants. Sur les murs du fort de Romainville, 1940-1944. Editions Libel, Lyon, 2012, 160 p.

 

"Les graffitis de la seconde guerre mondiale en Europe", article du site internet de l'A.D.S.F. (Association de défense du souvenir français), mis à jour en 2013, présentant de nombreux graffitis résistants.

 

 

  

 Partie réalisée par Mathilde BASTIEN et William HENRY DE VILLENEUVE

 

 


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